Découvrez cette innovation de Michael Bach
Une innovation de Michael Bach
De François-Xavier Tourte à Michael Bach
L’archet courbe BACH.Bogen est une invention récente du violoncelliste et compositeur Michael Bach. Convexe, contrairement à l’archet légèrement concave mis au point par François-Xavier Tourte au XVIIIè siècle, l’archet courbe BACH.Bogen présente l’intérêt de pouvoir jouer sur une, deux, trois ou quatre cordes simultanément, et de passer d’un mode de jeu à l’autre avec souplesse, d’une simple pression ou d’un relâchement du pouce.
Le premier prototype d’archet BACH.Bogen remonte à janvier 1990 et fut suivi de nombreux autres, élaborés notamment avec la collaboration de Mstislav Rostropovitch. Actuellement, les deux ateliers BACH.Bogen sont situés à Stuttgart en Allemagne, et à Wissembourg en France. Ils proposent plusieurs modèles d’archets courbes BACH.Bogen pour le violoncelle, ainsi qu’un modèle pour le violon et un autre pour la contrebasse.
Anatomie d’un archet BACH.Bogen
La baguette de l’archet BACH.Bogen, hautement convexe, est en bois de hêtre sur la plupart des modèles. Il existe deux courbures différentes pour les modèles destinés au violoncelle : l’un d’eux est destiné à l’usage sur quatre cordes (il en existe une variante encore plus arquée) ; l’autre, avec une courbure moins prononcée, au jeu sur trois cordes. Au niveau de la hausse, un levier permet de tendre et détendre la mèche. Selon le modèle, le levier est tout simple ou s’apparente davantage à une hausse traditionnelle.
Ajustements de la technique d’archet
L’archet BACH.Bogen nécessite évidemment de muscler la main droite, en particulier le pouce. Son usage requiert aussi d’ajuster les mouvements habituels de la technique d’archet du violoncelliste et à en mettre d’autres au point. La partie la plus importante du travail va consister à contrôler la tension de la mèche, de façon à être capable de la moduler en un seul geste.
La longueur de mèche utilisable étant moins grande que sur un archet traditionnel, le mouvement du bras droit plus complexe (courbe, pour accompagner la courbure de la mèche sur les cordes, plutôt qu’horizontal), et la gestion de la tension de mèche dévolue essentiellement au pouce, le contrôle du son est dans l’ensemble plus difficile, notamment pour obtenir une certaine homogénéité et éviter de saturer.
Le jeu monophonique et sur deux cordes est possible, avec peu de tension de mèche. Du fait de la conception très convexe de la baguette, la mèche est beaucoup moins bien équilibrée que l’archet Tourte pour le jeu monophonique. Par ailleurs, il est difficile d’obtenir des accents ou du spiccato convaincants, et la mèche a tendance à rebondir. Cet archet n’est donc pas particulièrement approprié pour le jeu monophonique en mode traditionnel, car il ne permet pas la finesse d’articulation de l’archet ordinaire.
Par contre, sa force repose en partie sur le jeu polyphonique sur trois cordes, qui ne pose aucun problème ; c’est même le mode de jeu le plus aisé et le plus naturel avec cet archet courbe. Le son est riche et équilibré, et il est même possible de jouer de petits accents.
Le jeu sur quatre cordes demande quant à lui davantage de maîtrise. Il n’est d’ailleurs possible de jouer sur les quatre cordes que sur environ deux tiers de la longueur de la mèche. Dans le tiers supérieur, cela reste possible de jouer encore sur trois cordes, puis seulement sur deux cordes à l’extrême-pointe. Il faut également noter que les quelques centimètres de mèche au niveau du levier, avant la grande courbure de la baguette, ne sont pas utilisables : l’extrême-talon est inaccessible. Au niveau de l’articulation, le jeu sur quatre cordes se prête surtout au jeu en tenuto. Toutefois, il est possible d’articuler davantage le son, bien que les accents soient moins prononcés et requièrent plus d’effort qu’une simple pression de l’index associée à une vitesse d’archet.
Pour soutenir un accord à quatre sons en tirant, il faut progressivement et légèrement courber vers le bas le mouvement du bras droit, et ajouter peu à peu de la tension sur le levier. On peut également s’aider en descendant petit à petit vers le chevalet, ce qui a pour effet d’augmenter naturellement la tension de la mèche sur les cordes. Enfin, il peut être utile d’incliner la baguette vers soi.
Il est probable que le jeu soit plus ou moins facile selon le violoncelle et ses réglages. La hauteur du chevalet et la courbure du pont — donc des quatre cordes — sont les paramètres les plus significatifs et peuvent faciliter le jeu sur quatre cordes, tant que les éclisses ne représentent pas une gêne à la manœuvre de la mèche.
Nouvelles possibilités, nouveaux défis
La deuxième force de l’archet BACH.Bogen est l’implication inévitable et les questions qu’il soulève quant à la remise en question de la technique de main gauche telle que nous la connaissons, dont nous n’évoquerons que quelques éléments spartiates ci-dessous.
L’emploi de l’archet BACH.Bogen nécessite donc une plus grande habileté de main gauche pour gérer les enchaînements entre accords, et un travail spécifique pour bien démêler les doigts. Si le jeu se fait souvent sur trois et quatre cordes, la musculature des doigts devra également être renforcée, pour appuyer nettement les doigts sur la touche et maintenir solidement des accords sans faiblir.
La justesse, naturellement, demande un travail plus poussé que les gammes en doubles cordes — tierces et sixtes — généralement pratiquées par tout violoncelliste. On pourrait envisager de travailler des gammes en accords à trois sons, voire à quatre sons, pour poser les bases d’une main gauche fiable et robuste pour le jeu polyphonique.
Mais ce n’est pas le seul changement qu’apporte l’archet BACH.Bogen. En effet, le jeu en accords peut pousser tant le compositeur que le violoncelliste à dépasser leurs horizons propres, en utilisant le pouce même dans les positions du manche, que ce soit pour exécuter des barrés bien fermes, ou pour élargir les écarts possibles. On peut aussi imaginer de jouer un triple-unisson : une corde à vide (par exemple ré, la deuxième corde), le pouce à l’unisson sur la corde inférieure (ré sur la troisième corde), et le quatrième doigt à l’unisson sur la corde encore inférieure (ré sur la quatrième corde). On peut même jouer sur des battements en rapprochant ou écartant le pouce et le quatrième doigt, pour produire un faux unisson avec la note juste, la note un peu basse et la note un peu haute.
L’archet BACH.Bogen encourage aussi le travail sur les harmoniques et les recherches d’harmoniques non-conventionnels (par exemple les harmoniques en quarte augmentée ou septième mineure), rendant les possibilités d’accords très riches non seulement en harmoniques, mais aussi dans des accords combinant harmoniques naturels, harmoniques artificiels et notes appuyées.
Ce qui n’est d’ailleurs pas sans poser des problèmes de notation lorsqu’il s’agit d’écrire de multiples harmoniques artificiels, à la fois clairs quant aux doigts à mobiliser, cordes et notes effleurées, mais aussi quant au rythme, qu’il devient difficile de concilier dans la même notationsans recourir à de multiples portées !
Évidemment, les implications de main gauche et les possibilités offertes par l’archet BACH.Bogen sont plus intéressantes au violoncelle qu’au violon ou à l’alto, et même qu’à la contrebasse, les écarts entre les doigts de la main gauche y étant mieux équilibrés et le pouce élargissant encore les possibilités, ce qui ne peut se produire ni au violon ni à l’alto, et qui n’a qu’un impact limité à la contrebasse.
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